Service Culturel

Au cœur des manifestations avec Léa Legallais

Le service culturel vous présente L’ère du temps, une exposition photographique de Léa Legallais, étudiante en 1re année de sociologie à l’Université Rennes 2.

L’ère du temps

Au plus proche des manifestant·es, Léa Legallais met en lumière les mouvements sociaux notamment à Rennes et à Paris. Une très belle série documentaire à voir jusqu'au 25 mars 2022 sur La Mezzanine du Tambour.

L’ère du temps

Avez-vous commencé la photographie directement avec des inspirations sociales ou y avait-il, à l’origine, des inspirations plus esthétiques ?

Léa Legallais. J’ai commencé la photo avant mes 10 ans, j’avais une obsession pour les logos de voiture et les chiens, du coup tous les jours je prenais ma petite 3DS et je faisais des photos jusqu’à ce qu’elle se décharge. J’ai fait une longue pause après ça, parce que le harcèlement scolaire que je subissais au collège m’avait enlevé toute envie de faire ce que j’aimais. J’ai recommencé beaucoup plus tard, début 2018, avec l’appareil photo que ma famille m’avait offert pour Noël. Je faisais surtout de la photographie de rue, puis en me lançant dans le projet de photographier les mecs de la rue à Saint-Malo, j’ai bifurqué vers la photographie sociale. Puis j’ai rencontré Ben, un ami de ma mère qui vivait dans son camion à l’époque et j’ai documenté des moments de sa vie pendant plus d’un an. Le mouvement des gilets jaunes est apparu la même année et comme je l’explique dans le texte de présentation de mon expo, c’est à ce moment-là que je suis tombée amoureuse des mouvements sociaux.

L’ère du temps

Comment ressentez-vous les relations avec les autres « photoreporters de mouvements sociaux » sur le terrain ?

L.L. Je dirais qu’elles sont cordiales pour la plupart. On est de plus en plus de photographes sur le terrain, donc il y a de la concurrence, c’est normal. Pour ma part, je préfère me détacher des groupes de photojournalistes qui se forment dans les manifestations, afin de présenter un point de vue différent.

L’ère du temps

Vous documentez les mouvements sociaux depuis 2018. Que ressentez-vous lorsque vous êtes au cœur d’une manifestation ?

L.L. Je ressens un bien-être immense, j’ai l’impression que je suis capable de tout. J’aime bien assimiler ma pratique de la photo à de la méditation. Je me laisse aller, j’oublie tout, je suis dans le moment présent. Avant tout manifestante, je ne documente que les évènements qui me tiennent à cœur pour l’instant. En faisant des photos j'ai vraiment l’impression d’être utile aux combats auxquels je participe, certains me remercient de visibiliser ce que les médias ne montrent pas forcément. J’essaie de donner une vision différente des mouvements sociaux en rentrant au cœur de ceux-ci.

L’ère du temps

Que vous apporte votre pratique photographique à votre formation en sociologie et vice-versa ?

L.L. Depuis mon entrée en sociologie, j’ai l’impression que ma vision de la photographie journalistique a beaucoup évolué, j’ai eu la chance de pouvoir faire des travaux d’enquête notamment des entretiens et des observations dans mon cursus. J’ai pu échanger en profondeur avec les personnes que j’étudiais et j’ai pu également observer comment elles fonctionnaient. Ce qui a grandement impacté ma pratique de la photographie. J’ai la sensation que je réfléchis beaucoup plus au contexte dans lequel je prends mes photos, je prends davantage en considération l’histoire que je veux raconter à travers celles-ci.

L’ère du temps

Quel regard portez-vous sur le photojournalisme ? Envisagez-vous une carrière dans cette voie ?

Il est difficile d’espérer un avenir dans le photojournalisme, les postes sont limités depuis quelques années. On demande de plus en plus aux journalistes d’être des couteaux suisses. De savoir faire de la vidéo, de la photo, être un bon rédacteur. Ce qui fait que les journaux n’engagent plus vraiment des personnes qui sont seulement photographes. Il existe les piges, mais il est très difficile de vivre seulement de ça et la concurrence est rude. Je viens seulement de commencer à envisager de commercialiser mes photos, je ne possède pas encore les codes du photojournalisme, ni les contacts, mais j'espère un jour en vivre.

L’ère du temps

Si vous étiez un livre ?

« Éloge des mauvaises herbes : Ce que nous devons à la ZAD », c’est un recueil de témoignages de personnes ayant des liens plus ou moins proches avec la ZAD de

Notre-Dame-des-Landes. Je l’ai découvert récemment par le biais d’un de mes cours et je l’ai trouvé extrêmement inspirant. On y apprend que des alternatives au capitalisme sont possibles et qu’en résistant à la propagande de l'État nous pouvons construire une société plus juste, à l’écoute des maux de chacun, en s’éloignant du culte de la personnalité et de l’individualisme qu’a engendré la révolution industrielle. Enfin bref, je le conseille, très bonne lecture.

Un film ?

Ce serait sûrement Shutter Island, parce que ma vie est faite de retournements de situations.

Une chanson ?

En ce moment je dirais NAKRé de Laylow, parce que cet artiste est une pépite et que ses morceaux résonnent en moi, particulièrement en ce moment. Streamez-le, ça vaut le coup. (Et Territory de The Blaze, ça fait deux, je n’arrive pas à choisir, oups)

 

Rédaction : Clara Guichard 

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